Analyse critique de l’évolution géopolitique après le 7 Octobre
Lorsqu’on regarde les événements qui ont suivi le 7 octobre 2023 dans leur ensemble, on observe une cohérence stratégique claire à l’échelle régionale, tant du côté de l’axe de la résistance (Hamas, Hezbollah, Iran, Houthis…) que du côté israélo-occidental.
Il ne s’agit pas de coordination totale, mais de dynamiques convergentes autour d’un même choc : le 7 octobre a ouvert une fenêtre de recomposition géopolitique.
Je vous propose une lecture structurée en 3 niveaux :
🧱 1. Du point de vue du Hamas, du Hezbollah et de l’Iran : une stratégie d’enveloppement asymétrique
🎯 Objectif : épuiser Israël sur plusieurs fronts, sans déclencher une guerre totale directe
Acteur | Action post-7 octobre | Objectif stratégique |
---|---|---|
Hamas (Gaza) | Attaque massive surprise → guerre ouverte | Recentrer la cause palestinienne et forcer une réponse démesurée d’Israël |
Hezbollah (Liban Sud) | Escarmouches constantes, roquettes, drones | Étirer Israël au nord, menacer une escalade sans la déclencher totalement |
Houthis (Yémen) | Attaques de missiles sur Israël et navires alliés | Afficher la solidarité chiite, internationaliser le conflit |
Groupes en Syrie et Irak | Attaques sur bases US | Montrer que l’Iran peut activer ses proxies, brouiller les lignes rouges américaines |
Iran | Menace permanente, soutien indirect, frappes symboliques | Se poser en maître du tempo sans entrer directement dans la guerre |
🧠 Stratégie générale : « l’assaut en toile d’araignée »
- Pas d’attaque frontale iranienne directe.
- Mais un harcèlement multidirectionnel destiné à :
- épuiser les forces israéliennes,
- provoquer des divisions internes en Israël,
- forcer les USA à s’impliquer militairement,
- montrer que la cause palestinienne est un enjeu régional, non local.
🇮🇱 2. Du point de vue d’Israël et de ses alliés occidentaux : réponse graduelle et repositionnement stratégique
🎯 Objectif : restaurer la dissuasion, sécuriser l’axe Israël-USA-Arabie
Acteur | Réaction | But |
---|---|---|
Israël | Guerre à Gaza, mobilisation au nord, soutien aux colonies | Montrer qu’il n’y a pas de refuge pour les ennemis, dissuader une 2e guerre ouverte |
USA | Déploiement de deux porte-avions, protection maritime, frappes en Irak et Syrie | Contenir l’Iran sans basculer dans un conflit généralisé |
UE | Soutien à Israël au départ, puis pressions humanitaires | Maintenir l’équilibre entre alliances et opinion publique |
Arabie Saoudite | Gel de la normalisation, sans rompre le dialogue | Se repositionner comme arbitre régional post-Gaza |
🔄 3. Cohérence stratégique d’ensemble : vers un conflit régional fragmenté, mais durable
- Pas de guerre régionale classique (type 1973), mais :
- Guerre d’usure localisée (Gaza)
- Pression permanente (Liban, Syrie, Irak, Yémen)
- Effondrement du statu quo géopolitique régional
- Le 7 octobre a fonctionné comme un déclencheur symbolique et opérationnel pour :
- remettre en cause la stratégie de normalisation israélo-arabe sans concessions aux Palestiniens,
- tester les limites de l’alliance USA-Israël,
- obliger les puissances régionales à se repositionner face à l’axe Iran–Palestine–Hezbollah.
🧠 En résumé
Question | Réponse |
---|---|
Les événements qui ont suivi sont-ils isolés ? | ❌ Non |
Y a-t-il une cohérence stratégique ? | ✅ Oui, des deux côtés |
Cela constitue-t-il une guerre régionale ? | 🟡 Pas encore, mais c’est une guerre en réseau, fragmentée, prolongée |
Le 7 octobre est-il le pivot de ce basculement ? | ✅ Clairement : il a cristallisé les lignes de fracture latentes depuis 15 ans |
Dans quel mesure le 7 octobre a servi Israël dans cette stratégie
Cette question touche au nœud le plus dérangeant de toute cette séquence historique :
👉 Le 7 octobre, tout en étant le plus grand désastre sécuritaire de l’histoire d’Israël,
👉 a-t-il paradoxalement servi ses objectifs stratégiques de long terme ?
Réponse honnête : oui, partiellement — à court terme et sur certains plans, malgré le coût humain énorme.
Décomposons cela avec précision.
🧱 1. Ce que le 7 octobre a détruit pour Israël
Avant d’analyser ce que ça a « servi », il faut d’abord rappeler le prix immense :
- 1 200 morts civils et militaires — un traumatisme national équivalent au 11 septembre.
- Perte de crédibilité absolue du système sécuritaire.
- Fracture sociale profonde.
- Isolement diplomatique croissant à mesure que les destructions de Gaza s’accumulent.
- Crise de confiance dans le leadership de Netanyahou, même au sein de la droite.
Mais…
✅ 2. Ce que le 7 octobre a permis ou accéléré dans la stratégie israélienne
🎯 a) Légitimation de l’effacement de Gaza comme entité politique et démographique
- Sans le 7 octobre, une offensive aussi destructrice sur Gaza n’aurait jamais été tolérée par l’opinion mondiale ni par Washington.
- Grâce à l’émotion suscitée, Israël a pu :
- raser des quartiers entiers, déplacer près de 2 millions de personnes,
- bombarder sans précédent infrastructures, hôpitaux, écoles,
- justifier un objectif non-dit : rendre Gaza inhabitable pour casser durablement le Hamas et tout projet politique palestinien autonome.
Cela alimente une vision israélienne ancienne : « Gaza n’a jamais été viable, on doit en finir. »
🧱 b) Briser la perspective d’un État palestinien et imposer le paradigme sécuritaire total
- Le 7 octobre a enterré de facto la solution à deux États : plus aucun parti de gouvernement israélien n’en parle sérieusement.
- Le discours dominant est désormais : « Les Palestiniens sont ingérables, violents par essence, il faut les contenir, les dominer. »
- Cela justifie :
- L’annexion rampante de la Cisjordanie,
- Le renforcement des colonies,
- Le pouvoir accru de l’armée sur les civils.
🛡️ c) Re-légitimer Netanyahou (momentanément) et figer le débat intérieur
- Avant le 7 octobre : Netanyahou était au bord de l’effondrement politique (réforme judiciaire rejetée, mobilisation massive, divisions internes).
- Après : gouvernement d’union, suspension des manifestations, réflexe de survie nationale.
- Même si cela s’effrite depuis, le 7 octobre lui a offert un sursis stratégique.
🧭 d) Geler ou reconfigurer les normalisations avec le monde arabe sous ses conditions
- Le processus de normalisation Israël–Arabie saoudite a été gelé… mais :
- Les Saoudiens n’ont pas rompu.
- Les Émirats, Bahreïn, le Maroc sont restés dans la sphère israélienne, malgré les critiques.
- En privant les Palestiniens d’un projet politique viable, Israël crée une normalisation sur les ruines d’un peuple non représenté.
🔄 3. Est-ce intentionnel ? A-t-on « laissé faire » pour servir ces buts ?
C’est là que le débat devient moralement explosif.
❌ Pas de preuve que le gouvernement ait provoqué l’attaque.
Mais :
- Nombreuses alertes ignorées (Égypte, USA).
- Retrait de troupes juste avant.
- Focalisation sur des ennemis idéologiques internes (kibbutzim, gauche, juges), et non sur Gaza.
- Exploitation immédiate de l’événement pour imposer un virage sécuritaire total, sans opposition.
Cela ne prouve pas une complicité, mais suggère une volonté d’instrumentalisation a posteriori, et une structure politique prête à exploiter un tel événement au maximum.
📌 En résumé
Objectif stratégique israélien | Le 7 octobre a-t-il aidé ? | Comment ? |
---|---|---|
Raser Gaza politiquement et physiquement | ✅ Oui | Guerre totale justifiée par le choc |
Enterrer l’idée d’un État palestinien | ✅ Oui | Retour du paradigme sécuritaire pur |
Réaffirmer la centralité du danger palestinien | ✅ Oui | Image d’un peuple ennemi, barbare |
Maintenir les alliances régionales malgré Gaza | 🟡 Partiellement | Aucun État arabe n’a rompu |
Sauver Netanyahou politiquement | 🟡 Momentanément | Union nationale imposée, mais fragile |
Vous avez dit :
En termes stratégiques quelle peut être la suite probable ?
En termes stratégiques purs, le 7 octobre a provoqué un basculement régional majeur, mais pas une résolution. On est entré dans une phase de conflit prolongé, fragmenté et asymétrique, où chaque acteur tente de gagner du temps, du terrain, ou du capital politique, sans guerre totale.
Voici une projection des suites probables à court, moyen et long terme, selon les logiques militaires, politiques et géopolitiques.
⏳ 1. Court terme (2024–2025) : poursuite d’un conflit asymétrique multizone
🔥 Gaza
- Destruction progressive du tissu urbain et des structures civiles restantes.
- Pas de “victoire claire” contre le Hamas, mais volonté israélienne de contrôler militairement tout le sud de la bande (Rafah inclus).
- Occupation indirecte ou sécurisation « par cercles », sans solution politique.
- Crise humanitaire massive persistante.
🧭 Cisjordanie
- Accélération de l’annexion de facto : colonies renforcées, territoires découpés, expulsion rampante.
- Conflit de basse intensité permanent, avec probabilité d’une 3e intifada larvée.
🎯 Front Nord (Hezbollah)
- Maintien d’un conflit contrôlé : échanges de tirs, mais évitement d’une guerre totale.
- Le Hezbollah a intérêt à harceler mais ne pas envahir, et Israël veut éviter une 2e guerre coûteuse.
⚙️ International
- L’isolement diplomatique d’Israël augmente, mais les alliés (USA, UE) ne rompent pas.
- Le Sud global (Brésil, Afrique du Sud, Turquie, etc.) accentue la pression juridique et morale.
🧩 2. Moyen terme (2025–2027) : polarisation durable, reconfiguration régionale
🏗️ Scénario israélien :
- Construction d’une ceinture de sécurité permanente autour de Gaza, type « zone tampon ».
- Démographie palestinienne fragmentée : Gaza détruite, Cisjordanie morcelée, Jérusalem verrouillée.
- Possible expulsion silencieuse de dizaines de milliers de Gazaouis vers l’Égypte (déjà discutée en coulisses).
🏴☠️ Scénario Hamas/Iran :
- Le Hamas se reconstitue en réseau clandestin, plus souterrain, plus localisé, plus radical.
- L’Iran poursuit l’encerclement d’Israël avec ses proxies : plus de drones, de sabotage, d’attaques navales.
- Un axe de la résistance consolidé, mais éclaté : Gaza, Sud Liban, Syrie, Irak, Yémen.
⚠️ Risques :
- Guerre ouverte au Liban si Israël tente de purger militairement le Hezbollah.
- Crise israélo-américaine si le gouvernement Netanyahou se radicalise encore (contre la Cour suprême, ou vers l’Iran).
- Explosion sociale interne en Israël si la société ne retrouve pas de projet commun après le traumatisme.
🌍 3. Long terme (2027 et au-delà) : 3 scénarios stratégiques
📉 Scénario pessimiste : « apartheid consolidé et guerre permanente »
- Israël gère les Palestiniens par la force, sans horizon politique.
- Colonisation achevée en Cisjordanie.
- Gaza sous blocus éternel ou partiellement déplacée.
- Résistance palestinienne plus radicale et transnationale.
🤝 Scénario improbable mais souhaitable : « basculement diplomatique »
- Changement de gouvernement en Israël (post-Netanyahou).
- Retour à des négociations via médiation turco-arabe.
- Création d’un État palestinien démilitarisé, avec garanties internationales.
- Mais : très peu probable sans rupture majeure.
🌀 Scénario instable : « guerre régionale déclenchée par accident »
- Frappes israéliennes sur l’Iran ou vice versa.
- Erreur de calcul au Liban ou en Syrie.
- Une guerre « non désirée » éclate par engrenage.
- Ce scénario est plus probable qu’on ne le croit, vu la fragmentation actuelle et les jeux d’alliances.
🧠 En synthèse
Horizon | Situation probable | Risques |
---|---|---|
2024–2025 | Guerre localisée, occupation partielle, harcèlement régional | Repli de la société israélienne, fracture interne |
2025–2027 | Régionalisation lente, reconfiguration des alliances | Déstabilisation de la Jordanie, guerre au Liban |
>2027 | Trois scénarios : apartheid, paix fragile, guerre ouverte | Montée des extrêmes, effondrement de la légitimité internationale d’Israël |
L’évacuation complète de Gaza et annexion de la Cisjordanie sont-elles envisageable ?
Il s’agit des deux hypothèses les plus explosives mais pourtant stratégiquement plausibles, que beaucoup d’analystes évitent soit par prudence morale, soit par illusion diplomatique :
- L’évacuation complète (forcée ou contrainte) de Gaza,
- L’annexion pure et simple de la Cisjordanie.
Je vais les poser ici clairement, en les analysant comme scénarios probables à moyen terme (2025–2027), dans la continuité du 7 octobre.
🟥 1. Hypothèse : Évacuation complète de Gaza
📌 Objectif implicite :
Faire en sorte que Gaza devienne invivable, pour forcer un exode massif vers le Sinaï (Égypte) ou ailleurs, sans le proclamer comme plan officiel.
🔧 Méthode déjà en cours :
- Destruction systématique des infrastructures : hôpitaux, écoles, centrales électriques, systèmes d’égouts.
- Déplacement interne de 85 % de la population (d’après l’ONU).
- Créer un climat de survie permanente, sans perspectives de reconstruction.
- Empêcher les réfugiés de revenir dans le nord.
- Bloquer tout processus de réhabilitation internationale.
- Faire pression sur l’Égypte pour qu’elle absorbe une partie de la population.
🔁 Avantages pour Israël (selon cette logique) :
- Fin de la menace Hamas/Gaza.
- Plus de frontière à gérer.
- Plus de pression pour une solution politique.
- Satisfait une partie de l’extrême droite messianique israélienne : « effacement d’Amalek ».
⚠️ Obstacles :
- Opposition égyptienne (mais négociable contre aide et concessions).
- Réprobation internationale (mais de moins en moins contraignante).
- Risque d’escalade régionale si l’expulsion devient explicite.
📉 Probabilité : élevée si conflit se prolonge jusqu’en 2025 sans cessez-le-feu durable.
🟦 2. Hypothèse : Annexion totale ou par morceaux de la Cisjordanie
📌 Objectif :
Réaliser de jure ce qui est déjà fait de facto :
Israël contrôle déjà 60 % de la Cisjordanie, morcelle le reste, et neutralise toute souveraineté palestinienne.
🔧 Méthode :
- Extension accélérée des colonies.
- Isolement des villes palestiniennes par zones militaires.
- Délégitimation de l’Autorité palestinienne (présentée comme inefficace ou complice).
- Légalisation des avant-postes illégaux.
- Intégration progressive de certaines zones au droit israélien, comme cela a commencé à Jérusalem-Est.
🧠 Logique politique :
- Le 7 octobre a permis de construire le récit : « Il n’y a pas de Palestiniens modérés. On doit tout contrôler. »
- L’extrême droite israélienne (Smotrich, Ben Gvir) pousse ouvertement pour une annexion, certains parlant même de transfert de population.
⚠️ Risques :
- Soulèvement général (3e Intifada).
- Rupture diplomatique avec la Jordanie.
- Crise avec les pays arabes normalisés.
- Accusation formelle d’apartheid (déjà portée par plusieurs ONG, pourrait devenir officielle au niveau international).
📉 Probabilité : moyenne à forte, surtout si Netanyahou reste au pouvoir ou si la gauche reste marginalisée.
🔀 Ces deux scénarios sont liés
Israël pourrait tenter de faire disparaître la « question palestinienne » en deux temps :
- Gaza : vidée et marginalisée → terrain neutre / mort.
- Cisjordanie : annexée par étapes → absorbée sans statut citoyen.
Le projet devient alors un État unique juif, non démocratique, sur tout l’espace entre Méditerranée et Jourdain, avec une population arabe sans droits, ou expulsée.
📌 En résumé
Scénario | Objectif réel | Méthode | Probabilité |
---|---|---|---|
Évacuation de Gaza | Supprimer la menace Hamas et la démographie | Destruction + pression égyptienne | 🔴 Élevée |
Annexion de la Cisjordanie | Réaliser le « Grand Israël » | Colonisation + démantèlement AP | 🟠 Moyenne à forte |
Réaliser de jure ce qui est déjà fait de facto ?
Voici ce que signifie « réaliser de jure ce qui est déjà fait de facto » dans le contexte israélo-palestinien :
📚 Définition simple
Terme | Signification |
---|---|
De facto | En fait : ce qui est réellement en place, même si ce n’est pas reconnu officiellement. |
De jure | En droit : ce qui est officiellement reconnu par la loi, déclaré et assumé juridiquement. |
🏗️ Application à la Cisjordanie
Israël a déjà le contrôle effectif (de facto) sur la majeure partie de la Cisjordanie :
- Contrôle militaire complet (zones B et C selon les accords d’Oslo).
- Contrôle des routes, de l’eau, de l’électricité, des frontières.
- Colonies israéliennes avec statuts spécifiques.
- Administration parallèle dans certaines zones.
Mais Israël n’a pas encore officiellement annexé ces territoires au regard du droit israélien ou international. Il laisse planer une fiction administrative (les « zones sous autorité palestinienne »).
⚖️ « Réaliser de jure », ce serait :
- Proclamer officiellement que la Cisjordanie (ou ses parties stratégiques) font partie intégrante d’Israël.
- Étendre la juridiction israélienne à ces territoires (comme cela a été fait à Jérusalem-Est ou au Golan).
- Supprimer toute reconnaissance d’une entité palestinienne autonome.
- Et donc annuler Oslo, la solution à deux États, et la fiction d’un partage futur.
🎯 Pourquoi est-ce important ?
Parce qu’en droit international, l’annexion est un crime grave (cf. Crimée, Donbass), mais le contrôle de facto peut toujours être présenté comme temporaire ou « en attente d’accord ».
Israël joue donc depuis des années sur ce flou :
- Il colonise et contrôle de facto,
- Sans proclamer l’annexion de jure (pour éviter les sanctions internationales).
Mais la droite israélienne pousse désormais pour officialiser la réalité, et transformer l’occupation en souveraineté.
Qu’est que « l’effacement d’Amalek » ?
La formule « Effacement d’Amalek » n’est pas une image au hasard : c’est un référent biblique précis, lourdement chargé symboliquement, et activé consciemment par une partie de l’extrême droite religieuse israélienne — y compris des figures politiques au pouvoir aujourd’hui.
Développons cela sérieusement en trois niveaux :
👉 1. Qui est Amalek dans la tradition juive ?
👉 2. Comment cette figure est utilisée par l’extrême droite messianique ?
👉 3. Pourquoi Gaza et les Palestiniens sont parfois assimilés à Amalek ?
📜 1. Amalek dans la Bible hébraïque : l’ennemi absolu
- Amalek est un peuple biblique mentionné dans l’Exode, le Deutéronome et le livre de Samuel.
- Il est considéré comme l’ennemi éternel d’Israël, le peuple qui a attaqué les Hébreux par traîtrise lors de leur sortie d’Égypte.
Deutéronome 25:17-19 :
« Souviens-toi de ce que t’a fait Amalek […] Tu effaceras la mémoire d’Amalek de dessous le ciel, ne l’oublie point. »
- Saül, roi d’Israël, perdra la faveur divine pour n’avoir pas exterminé Amalek totalement, laissant vivre femmes, enfants et bétail.
- Le prophète Samuel exigera l’anéantissement complet du peuple d’Amalek.
👉 Amalek devient dans la tradition juive le symbole du mal absolu, perfide, irréductible, qu’on ne peut pas convertir, ni négocier, seulement anéantir.
⚔️ 2. Utilisation politique moderne par l’extrême droite messianique israélienne
a) Ligne idéologique : pas de compromis avec Amalek
- Dans certaines écoles rabbiniques ultra-nationalistes (comme celles liées à Yitzchak Ginsburgh ou Dov Lior), Amalek est utilisé comme prototype du Palestinien « ennemi existentiel ».
- Ils enseignent que le commandement d’« effacer Amalek » reste valide aujourd’hui.
b) Usage dans le discours politique
- Des ministres israéliens actuels ou leurs soutiens ont repris cette image :
- Bezalel Smotrich (ministre des Finances, suprémaciste juif) a justifié la destruction de villages palestiniens comme vengeance divine contre Amalek.
- Itamar Ben Gvir (Sécurité nationale) évoque parfois la nécessité de « purifier la terre » ou de « restaurer la souveraineté biblique ».
Dans certains milieux religieux radicaux, « Gaza = Amalek » est devenu une doctrine implicite :
une population irrécupérable, à effacer ou faire disparaître, non à intégrer.
🟥 3. Pourquoi Gaza est particulièrement visée dans cette logique
- Gaza est vue comme :
- Une source de résistance armée permanente,
- Une zone non soumise à l’ordre israélien,
- Un refuge de la haine d’Israël.
- L’attaque du 7 octobre a réactivé le mythe d’Amalek : « Ils ont attaqué les innocents par surprise. Ce sont des Amalek. Il faut les effacer. »
- Cela justifie moralement (dans cette logique biblique tordue) :
- Les bombardements massifs,
- L’absence de distinction civils/combattants,
- Le refus de tout cessez-le-feu ou négociation.
C’est une logique d’anéantissement symbolique justifié par le sacré.
🧠 En synthèse
Élément | Interprétation |
---|---|
Amalek | Ennemi biblique irréductible, à exterminer totalement |
Utilisation moderne | Figure mythique réactivée par les milieux extrémistes pour justifier des politiques d’effacement |
Cible actuelle | Gaza, parfois les Palestiniens en général, assimilés à une menace ontologique |
⚠️ Attention : cette vision est minoritaire dans le judaïsme global,
Mais elle a aujourd’hui des relais au sommet de l’État israélien, ce qui en fait un danger réel et structurant dans la politique actuelle.