Macron, les ultra-riches et le RN : Anatomie d’une stratégie à haut risque
Introduction
Depuis son ascension fulgurante à l’Élysée, Emmanuel Macron a été accusé par ses opposants de gouverner pour les riches. Mais derrière les critiques convenues, une hypothèse plus inquiétante prend forme : et si la montée du Rassemblement National (RN) n’était pas un simple échec de sa politique, mais une conséquence logique — voire utile — d’un projet de classe assumé ? Ce dossier propose d’explorer cette piste.
1. Un président issu du sérail financier
Passage chez Rothschild : rôle de banquier d’affaires dans des opérations à très haut niveau (Nestlé – Pfizer). Réseaux cultivés dans la finance, l’Inspection des Finances, et autour de la fondation Saint-Simon / Attali. Soutiens lors de la campagne de 2017 : milliardaires, médias privés, patrons du CAC 40.
1 bis. Un paysage médiatique verrouillé au service du pouvoir
L’ascension et la consolidation du pouvoir macronien se sont appuyées sur un paysage médiatique extrêmement concentré entre les mains de quelques milliardaires. Vincent Bolloré (CNews, Europe 1, Le Journal du Dimanche), Bernard Arnault (Le Parisien, Les Échos), Patrick Drahi (BFM-TV, RMC, Libération), Xavier Niel (Le Monde, L’Obs), ou encore Arnaud Lagardère (Paris Match, Europe 1) possèdent ou contrôlent l’essentiel des canaux d’information influents. Tous ont un intérêt objectif à préserver un ordre économique favorable aux grandes fortunes, et peu ont remis en cause les réformes fiscales pro-riches du macronisme. Dans ce contexte, le traitement médiatique de l’action présidentielle a souvent été complaisant, minimisant les critiques sociales tout en donnant une visibilité démesurée aux oppositions caricaturales, en particulier le RN. La mise en scène du duel Macron-Le Pen a ainsi été constamment entretenue, au détriment des forces de gauche pourtant représentatives d’une large part de l’opinion.
2. Un quinquennat taillé pour les plus aisés
Suppression de l’ISF (remplacée par l’IFI). Flat tax à 30% sur les revenus du capital. CICE transformé en allègement pérenne des charges. Réforme de l’assurance chômage + réforme des retraites. Faible taxation des superdividendes (+ explosion des versements entre 2017-2023).
3. Le « quoi qu’il en coûte »… pour les grandes entreprises
Soutien massif aux grands groupes durant le Covid. Plans de relance peu contraignants sur les conditions sociales ou écologiques. Faibles contreparties demandées (pas de limitation des dividendes).
4. Le RN, outil ou épouvantail ?
Un ennemi commode pour disqualifier la gauche (« c’est moi ou le chaos »). Absence de véritable combat politique ou judiciaire contre le RN. Laxisme vis-à-vis des idées d’extrême droite dans le débat public. Références implicites à une « dédiabolisation utile » pour le système.
5. Le coup de poker de la dissolution
Résultats européens de 2024 : RN en tête, gauche divisée. Macron dissout — malgré les risques — espérant un effet de surprise. Objectif possible : provoquer une recomposition, fragiliser durablement la gauche, valider une alliance tacite avec une droite plus dure.
6. Une gauche affaiblie, un RN renforcé, les riches protégés
Le spectre d’une cohabitation « molle » avec un RN limité par la Constitution. Macron comme « garde du coffre-fort » jusqu’en 2027. Risque réel : le RN accède au pouvoir mais ne touche pas aux intérêts des ultra-riches.
Un RN garant de l’ordre sans toucher au capital
Paradoxalement, si le RN accédait au pouvoir, sa fonction ne serait pas tant de renverser l’ordre établi que de le maintenir. Le parti d’extrême droite a su séduire une large part des forces de police et de gendarmerie, en défendant une ligne sécuritaire dure, parfois jusqu’à l’outrance. Ce soutien mutuel ouvre la voie à une forme de « stabilité autoritaire » : le RN serait en capacité de réprimer fermement les mouvements sociaux, les colères des quartiers populaires ou les manifestations d’ampleur comme celles des Gilets jaunes, tout en protégeant les intérêts des possédants. Ainsi, dans une logique de classe inversée, le RN, présenté comme antisystème, deviendrait le garant de la paix sociale — au profit des classes dominantes.
7. Un président sans avenir politique, mais un avenir tout court
Aucune possibilité de réélection. Perspective de reconversion dorée dans les cercles financiers internationaux. Exemple d’autres ex-dirigeants passés à la finance (Draghi, Barroso, Schröder…).
Conclusion
Et si Macron avait compris que le pire pour les ultra-riches ne serait pas le RN, mais une gauche vraiment populaire au pouvoir ? Dans cette hypothèse, toute stratégie destinée à bloquer l’un en laissant monter l’autre devient non seulement compréhensible, mais rationnelle. Reste à savoir si ce jeu dangereux ne finira pas par échapper à ses auteurs.














